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Index des articles > Articles de presse > Faut-il réhabiliter le pigeon biset?

 
 
Faut-il réhabiliter le pigeon biset?
 
 

Article posté par ΩFrançois.
Paru le samedi 22 juin 2013 à 09:08
Vu 966 fois.

Faut-il réhabiliter le pigeon biset?



Le Coeur des sciences de l'UQAM fait découvrir l’écologie des pigeons urbains image.jpg Ils sont nombreux à vivre de la charité publique, dans les rues de la ville et dans ses parcs, au gré des poignées de grain lancées à leur intention. Plusieurs d’entre nous lèvent le nez sur cette communauté d’itinérants volatiles, gloussante et roucoulante. Mais peu savent que ce sont bien les humains qui ont importé les pigeons dans les villes, à des fins alimentaires, avant que cette espèce ne soit définitivement supplantée par le poulet dans la chaîne alimentaire des humains. C’est ce que raconte le biologiste Luc-Alain Giraldeau, dans le cadre d’un atelier du Coeur des sciences de l’UQAM, qui porte sur l’écologie des pigeons en milieu urbain. Domestiqués par les Égyptiens il y a plusieurs milliers d’années, les pigeons auraient fait leur apparition au Québec avec les premiers colons français et anglais. Ils étaient alors élevés pour leur chair, particulièrement tendre chez le pigeonneau. Les pigeons adultes, plus coriaces, se cuisinaient plus longuement mijotés. Au fil des siècles, ils s’adaptent à la proximité des hommes, dont ils ont désormais besoin pour vivre. Très fidèles à leur nid, ils le retrouveront même à des dizaines de kilomètres de distance, en se fiant à la position du soleil ou au champ magnétique terrestre. C’est d’ailleurs cet instinct qu’ont exploité les éleveurs de pigeons voyageurs, dont François Messier, qui vit en Montérégie, est l’un des derniers représentants au Québec. Récemment, un pigeon belge coursier s’est vendu à l’encan à un entrepreneur chinois au prix de 410 000 $! Mais abandonnés par les agriculteurs, au profit du poulet, plus rentable et plus facile à élever, les pigeons se sont généralement massivement retrouvés, littéralement, dans la rue… Depuis, les pigeons n’ont pas bonne presse. Conspués pour leurs fientes et pour leur roucoulement jugés inopportuns en milieu urbain, décriés pour le dommage qu’ils font aux bâtiments, ils sont aussi craints pour les maladies potentielles qu’ils pourraient transmettre. Pourtant, selon M. Giraldeau, les pigeons bisets, puisque c’est cette espèce que l’on trouve en ville, ne transportent pas plus de maladies que n’importe quel autre animal. En fait, ils en transmettraient moins que les perruches ou les perroquets que l’on trouve dans les animaleries par exemple. Leurs puces, s’ils en ont, ne se transmettent pas aux hommes. Les pigeons, comme d’autres animaux, peuvent cependant transmettre la salmonellose. Amis des pigeons Mais les pigeons ont aussi des amis qui les nourrissent en secret. Certains vont jusqu’à se promener en auto, les soirs d’hiver, avec de gros sacs de grains, pour assurer la survie de leurs volatiles chéris. Sans eux, les pigeons ne passeraient pas l’hiver. Ces amis sont cependant discrets, parce que nourrir les pigeons est illégal au Québec, comme il est d’ailleurs interdit de nourrir les écureuils, les goélands ou les chats errants. Luc-Alain Giraldeau, aujourd’hui vice-recteur à la recherche à la faculté des sciences de l’UQAM, est un ami avoué des colombidés. Il a déjà d’ailleurs déjà sauvé deux pigeons bruns femelles de la dissection avant de les emmener chez lui. Au cours de la promenade qu’il propose au grand public, il explique comment le couple de pigeons est généralement monogame, la femelle pondant deux oeufs à la fois, parfois tous les mois et demi. Comment le pigeonneau est d’abord nourri d’un lait que ses parents, mâle et femelle, fabriquent dans leur jabot. Comment le reflet coloré qui décore leur gorge ne vient pas de la couleur des plumes, mais bien du reflet de la lumière sur elles. Au milieu du square Phillips, il examine les spécimens, détecte un unijambiste, et explique comment des pigeons ont abîmé leurs pattes sur les pics que l’on met sur les corniches pour s’en débarrasser. Au bout du compte, il emmène le groupe devant la magnifique rosace de l’église Saint-James, rue Sainte-Catherine, où plusieurs couples de pigeons ont fait leur nid. Lovés dans les replis de cette oeuvre d’art, comme dans les creux des falaises où ils nichaient il y a des millénaires, ils se trouvent à l’abri du vent. Pour Daniel Durand, de la firme DFS, qui participait à la promenade et qui travaille à la réfection de bâtiments historiques, les pigeons sont aussi un problème. Au centre-ville, les propriétaires se plaignent de l’effet de leurs fientes sur les terrasses. D’autres craignent l’effet acide de ces fientes sur les vieilles pierres de leur demeure. Certains immeubles finissent aussi par être endommagés à force d’être récurés. Ce qui amène Luc-Alain Giraldeau à se demander quelle est la place des animaux dans la ville, qui plus est celle des pigeons, qui ont été amenés ici par la volonté de l’homme. Il va jusqu’à les comparer aux itinérants, qu’on voudrait parfois voir changer de lieux, mais qui n’ont pas d’autres endroits où aller. Le mois dernier, l’artiste Chloé Roubert a d’ailleurs tenu un événement sur le thème de la réhabilitation des pigeons. À cette occasion, elle citait l’anthropologue Mary Douglas selon laquelle « dirt is a matter out of place (la saleté est quelque chose qui n’est pas au bon endroit) ». Confrontée, comme toutes les grandes villes du monde, à la question de la prolifération des pigeons, la Ville de Paris a inauguré ses premiers pigeonniers contraceptifs. Nourris, blanchis, logés, les pigeons n’ont droit d’y pondre qu’une portée par année, au lieu de six ou sept. Les autres oeufs sont secoués manuellement jusqu’à ce que l’embryon meure. Si l’on n’espère pas se débarrasser ainsi des quelque 50 000 à 100 000 pigeons parisiens, on souhaite quand même assurer une certaine paix sociale entre les ennemis des pigeons et leurs défenseurs, dont les échanges sont là-bas, semble-t-il, parfois violents…