pourquoi les pigeons se fatiguent ils à voler à 2?


Une étude britannique a étudié le vol de pigeons voyageurs en solitaire et en duo. Le résultat, surprenant, montre que le vol groupé optimise l'itinéraire des oiseaux au prix d'une dépense d'énergie supplémentaire considérable.
Pourquoi les pigeons se fatiguent-ils à voler à deux ?
On sait que les oies, les canards et d’autres oiseaux migrateurs volent en V pour économiser de l’énergie et parcourir plus efficacement de longues distances. Les pigeons voyageurs, eux aussi, volent en groupe – souvent en duo. Mais loin de leur faciliter la vie, ce mode de déplacement leur demande plus d’efforts qu’un vol en solo ! «Les résultats de notre étude sont complètement inattendus», s’étonne Lucy Taylor, zoologiste à l’université d’Oxford. «L’énergie est la monnaie de la vie ; il est donc stupéfiant que les oiseaux soient prêts à payer un coût énergétique substantiel pour voler ensemble.»

Son équipe de six chercheurs a comparé le vol de pigeons voyageurs en solitaire et par paires, surveillant leur trajectoire avec un capteur GPS et leurs mouvements avec un accéléromètre, le tout fixé sur leur dos (pour un poids de 27 grammes). Il s’avère que la fréquence de battement d’ailes augmente de 18% quand les oiseaux volent en paire, ce qui correspond à un battement supplémentaire par seconde… le tout pour un gain de vitesse assez ridicule de 3%.


A : Un pigeon voyageur équipé d'un capteur GPS et d'un accéléromètre. B à E : fréquence de battement d'ailes, en bleu pour les vols solo et en rouge pour les vols en duo.A : Un pigeon voyageur équipé d’un capteur GPS et d’un accéléromètre. B à E : fréquence de battement d’ailes, en bleu pour les vols solos et en rouge pour les vols en duo. (Taylor et al, PLOS Biology, 2019)

Et la dépense d’énergie supplémentaire reste identique quelle que soit la position relative des oiseaux – l’oiseau qui vole derrière ne semble pas profiter d’un effet d’aspiration. Ce n’est donc pas pour une question d’aérodynamique que les pigeons voyageurs volent par deux.

Optimiser l’itinéraire
Pourquoi, alors ? Pour booster leur logiciel de navigation intégré, pensent les chercheurs. Les pigeons voyageant en paire suivent un trajet plus précis, réduisant la distance parcourue de 7% et leur temps de vol de 9% sur une route qu’ils connaissent pourtant bien. Comme s’ils mettaient en commun leur sens de l’orientation pour optimiser l’itinéraire… Chez les pigeons voyageurs, «deux têtes valent mieux qu’une», rappelle l’étude.

Route suivie par l'oiseau S30 durant ses voyages solo (en bleu) et en couple (en rouge). Le trajet est plus direct quand il vole accompagné.Route suivie par l’oiseau S30 durant ses voyages. Le trajet est plus long quand il vole seul au début (bleu clair), plus direct quand il vole accompagné (rouge), et de nouveau plus tortueux quand il est à nouveau seul à la fin de l’expérience (bleu foncé).



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Ce gain d’efficacité dans la navigation semble suffisamment désirable pour que les volatiles cherchent coûte que coûte à voler accompagnés. Pour l’expérience, les chercheurs ont lancé les pigeons deux par deux, plus de cent fois. Seuls 5% des couples ont choisi de faire vol à part dès le départ. Et parmi ceux (les 95% restants) qui sont partis ensemble, seuls 10% se sont séparés plus tard sur le trajet. Les autres sont restés fidèles jusqu’au bout.

Un vol exigeant
Mais le vol en duo est plus exigeant que le vol solitaire. Il nécessite d’abord une meilleure stabilité, pour observer son compagnon de vol et se coordonner avec lui – on doit rester proches sans se gêner, et toujours se garder à l’½il. Battre des ailes plus vite permet d’atteindre cette stabilité : en battant 18% plus vite, les pigeons réduisent de 18% l’oscillation de leur corps. En outre, «des battements d’ailes plus fréquents permettent des réactions plus rapides et un plus grand contrôle des mouvements». Utile pour éviter les obstacles en chemin, et compenser l’encombrement du convoi !

Pour résumer, le vol à deux pigeons est certes fatigant, car il réclame une stabilité et une agilité accrue que les oiseaux obtiennent en battant des ailes plus vite, mais le bénéfice dans la navigation compense largement la sueur versée, car les oiseaux arrivent plus vite à destination et réduisent d’autant leur durée d’exposition aux prédateurs. Et ça, ça n’a pas de prix.




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Sujet écrit par seraphin le jeudi 27 juin 2019 à 21:44

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