Les pigeons voyageurs, passion de Philippe Odent

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Calais est à l’honneur dans un championnat de colombophilie. Rencontre avec le nouveau président de la colombophilie du Calaisis.
Savez-vous que le pigeon voyageur fait partie de la grande Histoire de France et qu’il a même joué à plusieurs reprises un rôle éminemment salvateur ? Que cet animal a permis aux Alliés, alors que les moyens de communication modernes avaient montré leurs limites, de se transmettre des informations utiles à la sortie de la Première Guerre mondiale ? Qu’à la grande époque de l’économie libérée où on entendait les machines à dentelle tourner et où on voyait les gueules noires dans les corons, les pigeons voyageurs étaient un exutoire formidable où les patrons et les ouvriers pouvaient se défier dans des joutes populaires ? Qu’aujourd’hui encore, le 8e régiment de transmissions de Suresnes possède, dans l’enceinte du fort du Mont Valérien, le dernier colombier militaire parfaitement entretenu ? Et qui est capable de dire aujourd’hui de manière irréfutable comment ces voyageurs arrivent à retourner systématiquement à leur colombier quel que soit le lieu où on les lâche ? Cela, malgré les connaissances scientifiques contemporaines, reste toujours et encore un mystère. Aujourd’hui, c’est grâce à des passionnés comme Philippe Odent, le nouveau président des colombophiles du Calaisis – qui regroupent pas moins de 9 sociétés de colombophiles et plus de 300 adhérents –, que l’on peut apprendre à découvrir ce qui est depuis une centaine d’années un véritable sport familial, solidaire, au sens social fort, dans lequel l’esprit de compétition, la patience et un profond respect pour la nature et ses représentants permettent de réussir à sortir du lot.

Une passion familiale

Comme pour beaucoup de passionnés du genre, pour Philippe Odent cela a commencé quand il était jeune adolescent, au début des années 1970, avec son père qui s’est découvert un intérêt certain pour l’élevage et les courses de pigeons voyageurs. « Mon père s’est intéressé à cette discipline du jour au lendemain et a commencé à y prendre beaucoup de plaisir, explique-t-il. Je l’ai accompagné aux différents concours auxquels il participait régulièrement, on s’y retrouvait avec d’autres familles dans un moment convivial et solidaire et j’ai apprécié cette ambiance, le contact avec l’animal et l’esprit de compétition qui guidait ces concours». Aujourd’hui, d’ailleurs, une partie de ses pigeons n’est que la descendance de reproducteurs qui appartenaient à l’origine à son père.

En 1985, Philippe Odent acquiert sa toute première licence dans la société de colombophiles qui est de nouveau la sienne aujourd’hui, La Vitesse de Coulogne. « Et déjà à l’époque, j’ai eu d’emblée des fonctions dans l’équipe dirigeante puisque j’étais le vice-président de la société ! », précise-t-il. Et de vice-présidence en secrétariat, et de secrétariat en présidence, la passion de la colombophilie ne l’a jamais quitté malgré un emploi du temps assez chargé, un métier qui lui imposait de nombreux déplacements la semaine et un investissement associatif qu’il a toujours pris au sérieux le reste du temps.

Philippe Odent rappelle tout de même qu’il n’aurait certainement pas réussi à maintenir une telle passion si sa famille ne l’avait pas autant accompagné. « Ma femme a toujours su prendre le temps de s’occuper du colombier chaque matin pendant que j’étais en déplacement ou lorsque pour une raison quelconque je n’ai pas pu m’en occuper, révèle-t-il. Pour cela je ne peux que la remercier ». Et même si aujourd’hui ses deux filles et son fils ne sont pas devenus des mordus de la colombophilie – « les nécessités de la vie, la famille, le travail » explique-t-il –, ses enfants ont pu partager plus jeunes ses petits plaisirs avec lui et « peut-être, comme beaucoup de personnes ayant connu cela plus jeunes, reviendront-ils à la colombophilie plus tard quand ils auront plus de temps ».

Un objectif raisonnable, une réussite en ligne de mire

« Mais attention, j’ai toujours su faire la part des choses, et comme je le dis toujours aux jeunes qui commencent, il faut savoir être raisonnable et ne pas chercher à trop vouloir en faire, explique-t-il. Je suis toujours sidéré quand je vois des jeunes commencer et avoir plus de pigeons que moi en très peu de temps. Ce n’est pas comme cela que l’on fait du bon travail ».

Propriétaire d’une centaine de pigeons, ce qui est peu dans le milieu de la colombophilie, Philippe Odent privilégie la qualité à la quantité. Et il semble bien que les amateurs et futurs amateurs de colombophilie aient tout intérêt à écouter ses précieux conseils. Sa patience, sa minutie, sa passion pour les pigeons voyageurs et sa connaissance de la colombophilie lui ont plutôt bien éussi. « Je peux dire aujourd’hui que je m’en sors pas trop mal, dit-il avec modestie. Ma méthode ? Je me fixe un objectif raisonnable à atteindre, je m’y tiens sans me disperser, je prends le temps qu’il faut pour l’atteindre et jusqu’à aujourd’hui cela m’a plutôt réussi puisque j’ai eu les résultats que j’escomptais ». Spécialisé dans les courses de fond de plus de 800 km et les concours internationaux, Philippe Odent, après une belle victoire en nationale à Pau 2013 avec un pigeon de 3 ans nommé Trésor, vient de décrocher la première place du championnat de France du Club des Internationaux de France où on retrouve plus de 400 adhérents et plus de 800 joueurs occasionnels, et dont il est d’ailleurs le secrétaire. « L’année dernière ce sont des Calaisiens qui avaient également décroché cette première place, les frères Rezenthel avec qui on s’entend très bien, explique-t-il. Ils m’ont d’ailleurs félicité dès qu’ils ont su pour ma première place, Calais est encore à l’honneur et cela prouve que nous sommes des amateurs très avertis avec un vivier de pigeons de haute qualité. D’ailleurs, les frères Rezenthel sont bien classés en 20e place, avec un autre Calaisien qui est à la 59e place, José Lecerf. Quand on voit le nombre de participants, on se dit que Calais est très bien représenté !, se félicite-t-il en tant que président de la Colombophilie du Calaisis.

Une future retraite avec encore des objectifs en tête

Alors que la retraite de sa fonction de chargé d’affaires chez EDF approche, Philippe Odent compte bien ne pas en rester là. L’esprit de compétition toujours aussi affûté, il vise toujours plus haut en respectant encore sa méthode du pas à pas.

« Je ne vais pas m’investir tête baissée sous prétexte de ma retraite prochaine, précise-t-il. Je reste fidèle à mes convictions qu’il faut y aller avec méthode et qu’il faut laisser aux pigeons un temps de repos non négligeable comme à tout athlète qui a besoin de récupération. Si je vais les embêter plus souvent comme cela peut arriver parfois avec l’arrivée de la retraite et l’envie de plus occuper son temps libre, je prendrai le risque de les stresser et qu’ils perdent en efficacité ». Il n’en reste pas moins qu’il se fixe désormais un prochain objectif, la Coupe d’Europe, où il espère décrocher un nouveau palmarès, même s’il a conscience que les choses seront plus corsées avec des adversaires chez qui la colombophilie est organisée professionnellement notamment chez les Belges, les Allemands ou les Néerlandais.

« Mais après tout, rappelle-t-il, notre amateurisme n’est pas forcément un handicap puisque l’année dernière parmi les 10 meilleurs Européens il ne faut pas oublier qu’il y avait 6 amateurs français, alors pourquoi pas ? ».

Une asso au service de ses membres et de leurs oiseaux

L’association des Colombophiles du Calaisis réunit 9 sociétés de colombophilie (La vitesse de Coulogne ; Le Télégraphe de Blériot-Plage ; La Sans-Pareil de Bois-en-Ardres ; l’Hirondelle de Guînes ; la Colombe Marckoise ; l’Eclaireur de Oye-Plage ; Le Centre, le Siège Unique et l’Envol à Calais) qui regroupent à ce jour environ 300 licenciés.

Le périmètre de jeu de l’association s’étend à 400 km vers le sud du Calaisis. Chaque société dispose d’une équipe de dirigeants bénévoles à la disposition de ses membres, chacune pouvant localement organiser des compétitions ;l’association des colombophiles du Calaisis pour rôle de fédérer et d’harmoniser l’ensemble, ainsi que de mutualiser les moyens afin de limiter les coûts. Ainsi, il y a quatre ans, l’association des Colombophiles du Calaisis a fait un gros investissement en achetant un camion pour transporter elle-même les pigeons.

Auparavant, elle faisait appel à des transporteurs extérieurs mais comme cela devenait de plus en plus cher, il a été décidé de faire cet achat qui profite à tous. L’association a également pour but de communiquer sur la colombophilie en organisation les manifestations mais également en promouvant la discipline auprès des jeunes au sein des écoles dans un but éducatif.

« Nous venons avec des pigeons voyageurs à différents stades de leur vie afin de montrer leur évolution, explique Philippe Odent, président de l’association. Les enfants aiment la démarche car ils ont l’occasion de pouvoir voir de près des oiseaux et la démarche est éducative ».

Pour les personnes qui seraient intéressées par la colombophilie, le président de l’association rappelle qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une place importante chez soi et l’investissement de base est loin d’être excessif.

« Un petit abri de jardin suffit à faire l’affaire, rassure-t-il. Une première acquisition de pigeon se fait globalement à 20 euro les pigeon, quatre suffisant pour commencer, mais je conseille pour cela de ne surtout pas en chercher sur internet où les prix peuvent être parfois excessifs en plus sans certitude de leur provenance, met-il en garde. Il vaut mieux se rapprocher de nous ou profiter d’une manifestation qu’on organise pour se renseigner ». Ajouter à cela une bague de matricule obligatoire certifiant votre propriété sur l’animal à hauteur de 50 centimes la bague et la vaccination obligatoire (80 doses pour 20 euros), il ne vous restera plus qu’à penser aux graines pour l’alimentation.

Pour le futur, Philippe Odent a pour projet avec l’association de redynamiser le championnat de vitesse : « Je souhaite restructurer l’ensemble des classements en un classement unique pour plus de lisibilité afin notamment de mettre tout le monde sur un pied d’égalité et continuer notre action afin de diminuer le coût du transport. »


Article écrit par François le samedi 23 août 2014 à 22:56

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